Je réfléchis un moment.
— Tu es née ici ?
— Je ne sais pas.
Soudain alarmé, je vis des larmes briller dans ses yeux.
— Galatée ! Pourquoi es-tu malheureuse ? Qu'est-ce qui ne va pas ?
Elle secoua ses boucles blondes et me sourit subitement.
— Mais rien ! Tout va très bien ! Comment peut-on être malheureux à Paracosma ?
Elle se leva d'un bond et me prit par la main.
— Viens ! Allons cueillir des fruits pour demain !
Elle s'élança dans un tourbillon d'argent, et je la suivis, contournant derrière elle une aile de la maison. Gracieuse comme une ballerine, elle sauta pour saisir une branche, s'y accrocha en riant et me lança un grand globe doré. Elle chargea mes bras de fruits éclatants et m'envoya chercher la jatte de cristal vide abandonnée sur le banc ; et, quand je revins, elle y entassa tant de fruits qu'un déluge de sphères multicolores cascada tout autour de moi. Elle rit encore, les envoyant rouler dans le ruisseau du bout de ses orteils roses, tandis que je l'observais, sentant monter en moi une douloureuse nostalgie.
Et puis soudain, elle me fit face. Pendant un long moment, nous restâmes immobiles, les yeux dans les yeux, avant qu'elle me tourne le dos pour rentrer lentement dans la maison. Je la suivis, chargé de fruits, une nouvelle fois en proie au doute et à la perplexité.
Le soleil géant se perdait à l'ouest, derrière les arbres de la forêt colossale. Une brise fraîche naissait des ombres allongées. Le ruisseau semblait violet au crépuscule, mais son joyeux murmure se mêlait toujours à la musique des fleurs.
Enfin, le soleil se cacha ; des doigts ombreux assombrirent la prairie. Brusquement, les fleurs se turent ; seul le ruisseau continua de chanter dans un monde de silence. En silence aussi, je franchis l'arche de la maison, ou je choisis de marcher vers le crépuscule.