— Galatée, qui prendras-tu comme compagnon ?

Elle me considéra gravement.

— Je ne sais pas. Au moment voulu, il viendra. C'est une loi.

— Et… tu seras heureuse ?

— Naturellement, dit-elle, puis elle parut troublée. Tout le monde n'est-il pas heureux ?

— Pas nécessairement, Galatée… Pas là où j'habite, en tout cas.

— Alors ce doit être un endroit bien étrange, ton monde des ombres. Un lieu assez terrible.

— Souvent, oui, avouai-je. J'aimerais...

Je m'interrompis. Qu’est-ce que j’aimerais ? Qu’est-ce que je désirais, vraiment ?

N’étais-je pas en train de parler à une illusion, un rêve, une apparition ?

Je contemplai la jeune fille, ses cheveux d'or lustrés, ses yeux, sa douce peau claire et alors, pendant un instant tragique, je tentai de sentir la terre, le sol, le vent, d'entendre les bruits de l'endroit réel où je devais me trouver, quelque part au pays des ombres... et je ne le pus. Je souris ; je tendis une main pour effleurer son bras nu et elle me regarda un instant, surprise et sérieuse, avant de se lever d'un bond.

— Viens donc ! Je veux te montrer mon pays !

Elle partit en courant le long du ruisseau, et je la suivis à regret.